Retrouvez le nouvel article de Stéphane Bellanger, Maître de conférences associé à l'IAE Paris-Sorbonne et Jean-Etienne Palard, Maître de conférences à l'IAE Bordeaux !
« Entreprise zombie », le nom peut faire sourire, tant les deux termes semblent a priori ne rien avoir à faire ensemble. Il s’agit pourtant d’un sujet très sérieux, car ces entreprises font peser de vrais risques sur l’économie. Ce phénomène souterrain gagnerait à être mieux connu et ces entreprises à être mieux détectées par le système bancaire et financier.
Les « entreprises zombies » sont un peu comme des patients sous perfusion : elles survivent grâce à des prêts ou des aides extérieures, mais ne sont pas vraiment viables sur le plan économique. L’OCDE les définit comme des entreprises de plus de dix ans qui, durant les trois années précédentes, ont davantage dépensé pour rembourser leurs dettes qu’elles n’ont réalisé d’excédent brut d’exploitation (c’est ce qui se dégage de l’activité normale de l’entreprise). Les entreprises zombies partagent plusieurs caractéristiques communes : manque de rentabilité, difficulté à se restructurer et à innover mais aussi difficulté pour les repérer. Elles parviennent en effet souvent à rembourser leurs échéances, masquant leur insolvabilité.
La définition de l’OCDE paraît donner un cadre comptable clair. Néanmoins, elle ne prédit rien de l’avenir des firmes concernées. D’après une analyse de la Banque de France, 40 % des entreprises devenues zombies en 2010 étaient redevenues viables trois ans après, tandis que seules 30 % ont été placées en liquidation judiciaire. L’affaire Carillion au Royaume-Uni illustre les risques liés à la complexité croissante des normes comptables, avec une entreprise du BTP qui a utilisé des pratiques agressives pour masquer sa situation financière avant de s’effondrer en 2018. De même, le cas Wirecard qui a secoué l’Allemagne en juin 2020 a montré comment une entreprise peut manipuler son image financière pour attirer des investissements tout en étant en réalité insolvable.
Difficiles à repérer, les véritables zombies représentent pourtant un enjeu majeur pour nos économies.